Assurance emprunteur : de nouvelles règles du jeu à partir du 1er juin

Alexandre Dabin

19 mai, 2022

La loi Lemoine du 28 février 2022 a pour objectif de rendre l’accès au marché de l’assurance emprunteur plus juste, plus simple et plus transparent que ce qu’il était jusqu’à présent. Son principal apport est de permettre la résiliation à tout moment du contrat d’assurance couvrant un prêt immobilier. Les refus des établissements prêteurs pour toute délégation d’assurance devront être explicites et motivés.

Non obligatoire sur le plan juridique, mais quasi systématiquement demandée lors de la souscription d’un prêt immobilier, l’assurance emprunteur permet de couvrir les risques de décès, d’invalidité et/ou de perte d’emploi du souscripteur, l’assureur prenant alors le relais et remboursant les échéances du prêt, en totalité ou en partie. Différents dispositifs ont été adoptés par les parlementaires ces dix dernières années en vue de permettre une meilleure concurrence sur ce marché tenu encore à près de 90 % par les banques et leurs filiales dédiées. Cependant, les remontées du terrain montrent que les améliorations opérées n’ont finalement pas permis de répondre efficacement à l’objectif de libéralisation du marché de l’assurance emprunteur. Le manque d’information des consommateurs sur leurs droit reste encore important. De trop nombreuses demandes de substitution d’assurance n’obtiennent pas de réponse dans les délais prévus par la loi. Des réponses lacunaires de la part des établissements prêteurs et des objections erronées sur l’équivalence de garanties sont également constatées. Au bout du compte, les consommateurs paient le prix de cette absence de réelle concurrence en ne pouvant bénéficier concrètement d’offres alternatives qui leur permettraient d’effectuer des économies substantielles sur leurs dossiers d’emprunt.

Selon les promoteurs de la nouvelle loi, la résiliation à tout moment apparaît comme l’étape logique ultime devant permettre la véritable libéralisation du marché tant attendue. Le principe existe déjà pour d’autres types d’assurance (logement, automobile, etc.). En matière d’assurance emprunteur, après plusieurs tentatives avortées ces dernières années, la digue a fini par tomber cet hiver. Les banques vont donc devoir pleinement s’adapter, et rapidement…

Actuellement, la résiliation d’un contrat d’assurance emprunteur est possible jusqu’à la signature de l’offre de prêt, dans les douze mois de la signature de prêt, puis tous les ans à la date anniversaire de la signature de l’offre de prêt. Le souscripteur d’un emprunt immobilier pourra substituer et/ou résilier, à tout moment et sans frais, le contrat d’assurance du prêt :
- dès le 1er juin 2022 pour les nouvelles offres de prêt,
- à compter du 1er septembre 2022 pour les contrats d’assurance en cours à cette date.

L’établissement prêteur ne peut pas refuser en garantie un autre contrat d’assurance dès lors que ce dernier présente un niveau de garantie équivalent au contrat d’assurance de groupe qu’il propose. Il en est de même lorsque l’emprunteur fait usage du droit de résiliation. Rappelons que le prêteur est tenu de notifier sa réponse d’acceptation ou de refus de la délégation d’assurance dans un délai de 10 jours ouvrés à compter de la réception de l’autre contrat d’assurance.

Pour apprécier l’équivalence des garanties, la législation n’est pas modifiée sur ce point, l’emprunteur doit s’appuyer sur la fiche standardisée d’information, qui lui est systématiquement remise lors de la première simulation de l’offre de prêt, et sur une fiche personnalisée, qui tient compte de spécificités adaptées au type de prêt ou à son statut professionnel.

À partir d’une liste, dite « de place », établie par le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) qui comprend 18 critères, le prêteur doit choisir 11 critères au maximum pour sa fiche standard, complétés le cas échant de 4 critères au plus portant sur la garantie perte d’emploi. Ils doivent être rendus publics et le banquier doit préciser à son client les garanties, niveaux de garantie et les valeurs exigés correspondant à des « attentes raisonnables ».

L’obligation d’information à la charge du prêteur et de l’assureur sera renforcée à compter du 1er juin. Avant la formulation de l’offre de prêt, tout document fourni à l’emprunteur devra mentionner le coût de l’assurance en montant total dû par l’emprunteur, non seulement sur la durée totale du prêt, comme c’est le cas actuellement, mais aussi sur une durée de 8 ans. La notice énumérant les risques garantis et précisant les modalités de mise en jeu de l’assurance devra indiquer la possibilité pour l’emprunteur de résilier le contrat d’assurance à tout moment à compter de la signature de l’offre de prêt. Enfin, l’assureur devra informer chaque année l’assuré, sur support papier ou sur tout autre support durable, du droit de résiliation, de ses modalités et des différents délais de notification et d’information qu’il devra respecter.

Une amende en cas de manquement - Les refus de délégation d’assurance et tous les manquements aux obligations d’information du prêteur sont passibles d’une amende pouvant aller jusqu’à 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale.

Actuellement, une demande de résiliation du contrat d’assurance emprunteur doit être effectué par lettre recommandée ou par envoi recommandé électronique. La procédure sera assouplie à compter du 1er juin. L’emprunteur aura effectivement la possibilité de notifier sa demande de résiliation par :
- lettre ou tout autre support durable ;
- déclaration faite au siège social ou chez le représentant de l’assureur ;
- acte extrajudiciaire ;
- le même mode de communication à distance que l’assureur propose pour la conclusion du contrat ;
- ou tout autre moyen prévu par le contrat.

Toute décision de la banque qui finance le prêt refusant la substitution d’assurance devra être « explicite » et comporter « l’intégralité des motifs de refus ». Elle devra, le cas échéant, préciser « les informations et garanties manquantes ». En cas d’acceptation de l’assurance choisie par l’emprunteur, le contrat de crédit devra être modifié par voie d’avenant dans un délai désormais encadré : 10 jours ouvrés à compter de la réception de la demande de substitution. La banque ne pourra pas modifier les conditions d’octroi du crédit, y compris désormais son mode d’amortissement.

(Source : Editions Francis Lefebvre)

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