Action paulienne : de l’art de ne pas s’appauvrir
03 février, 2025
L’action paulienne est une créature connue.
On sait qu’elle permet à un créancier de se faire déclarer inopposable un acte d’appauvrissement du débiteur, si cet acte crée ou aggrave la situation d’insolvabilité du débiteur.
On sait également que, lorsque l’acte a été conclu à titre onéreux, l’action est conditionnée à la preuve de la mauvaise foi du tiers.
On sait encore que l’acte susceptible d’être attaqué peut être de différents types : le débiteur peut avoir donné son bien ou l’avoir bradé. Dans les deux cas, il s’est s’est appauvri. Et c’est pourquoi l’action paulienne est ouverte : si l’appauvrissement du débiteur crée ou aggrave son insolvabilité, l’acte peut être attaqué.
Mais quid d’un acte qui ne réalise aucun appauvrissement ? C’est la question posée à la Cour dans un arrêt rendu hier (Cass. Com, 29 janvier 2025, lien ci-dessous).
Au cas d’espèce, un débiteur avait cédé son fonds de commerce pour un prix normal. Il ne s’était donc pas appauvri. Cependant, la substitution dans son patrimoine d’une somme d’argent en lieu et place d’un fonds de commerce affecte les droits du créancier, en ce qu’il est plus facile à un débiteur de dissimuler une somme d’argent qu’un fonds de commerce.
La jurisprudence admet donc que la fraude paulienne puisse résulter, non pas d’un appauvrissement, mais d’un acte qui permette au débiteur de substituer à un bien aisé à saisir un bien aisé à dissimuler.
La question posée à la Cour était la suivante : dans ce cas particulier où la fraude paulienne ne résulte pas d’un appauvrissement, le créancier est-il tenu de prouver l’insolvabilité apparente du débiteur ?
La réponse est négative, pour la chambre commerciale : lorsque la fraude paulienne résulte de la substitution d’un actif difficile à dissimuler par un actif aisé à dissimuler, il n’est pas requis du créancier qu’il prouve l’insolvabilité apparente du débiteur.
La solution interpelle. D’un côté, il peut sembler logique de ne pas requérir la preuve de l’insolvabilité dès lors que l’acte n’opérant aucun appauvrissement, il est sans impact sur l’insolvabilité.
De l’autre, ne risque-t-on pas de permettre une trop grande immixtion du créancier dans les droits de son débiteur ? Si celui-ci n’est ni insolvable, ni dessaisi de ses droits, pourquoi ne peut-il, dès l’instant où il a une dette, céder un bien non grevé, pour un prix normal ?
En outre, comment caractériser l’intention frauduleuse du tiers ? Lorsqu’il n’y a pas d’appauvrissement, parce que le bien est vendu à sa valeur nominale, comment établira-t-on que le tiers savait que, grâce à cet acte, le débiteur entendait non pas se rendre insolvable, mais substituer un bien aisé à dissimuler à un actif aisé à saisir, afin d’échapper à son créancier ? La preuve semble bien difficile à rapporter.
(Sources : 29 janvier 2025 Cour de cassation Pourvoi n° 23-20.836 & Louis Thibierge).
On sait qu’elle permet à un créancier de se faire déclarer inopposable un acte d’appauvrissement du débiteur, si cet acte crée ou aggrave la situation d’insolvabilité du débiteur.
On sait également que, lorsque l’acte a été conclu à titre onéreux, l’action est conditionnée à la preuve de la mauvaise foi du tiers.
On sait encore que l’acte susceptible d’être attaqué peut être de différents types : le débiteur peut avoir donné son bien ou l’avoir bradé. Dans les deux cas, il s’est s’est appauvri. Et c’est pourquoi l’action paulienne est ouverte : si l’appauvrissement du débiteur crée ou aggrave son insolvabilité, l’acte peut être attaqué.
Mais quid d’un acte qui ne réalise aucun appauvrissement ? C’est la question posée à la Cour dans un arrêt rendu hier (Cass. Com, 29 janvier 2025, lien ci-dessous).
Au cas d’espèce, un débiteur avait cédé son fonds de commerce pour un prix normal. Il ne s’était donc pas appauvri. Cependant, la substitution dans son patrimoine d’une somme d’argent en lieu et place d’un fonds de commerce affecte les droits du créancier, en ce qu’il est plus facile à un débiteur de dissimuler une somme d’argent qu’un fonds de commerce.
La jurisprudence admet donc que la fraude paulienne puisse résulter, non pas d’un appauvrissement, mais d’un acte qui permette au débiteur de substituer à un bien aisé à saisir un bien aisé à dissimuler.
La question posée à la Cour était la suivante : dans ce cas particulier où la fraude paulienne ne résulte pas d’un appauvrissement, le créancier est-il tenu de prouver l’insolvabilité apparente du débiteur ?
La réponse est négative, pour la chambre commerciale : lorsque la fraude paulienne résulte de la substitution d’un actif difficile à dissimuler par un actif aisé à dissimuler, il n’est pas requis du créancier qu’il prouve l’insolvabilité apparente du débiteur.
La solution interpelle. D’un côté, il peut sembler logique de ne pas requérir la preuve de l’insolvabilité dès lors que l’acte n’opérant aucun appauvrissement, il est sans impact sur l’insolvabilité.
De l’autre, ne risque-t-on pas de permettre une trop grande immixtion du créancier dans les droits de son débiteur ? Si celui-ci n’est ni insolvable, ni dessaisi de ses droits, pourquoi ne peut-il, dès l’instant où il a une dette, céder un bien non grevé, pour un prix normal ?
En outre, comment caractériser l’intention frauduleuse du tiers ? Lorsqu’il n’y a pas d’appauvrissement, parce que le bien est vendu à sa valeur nominale, comment établira-t-on que le tiers savait que, grâce à cet acte, le débiteur entendait non pas se rendre insolvable, mais substituer un bien aisé à dissimuler à un actif aisé à saisir, afin d’échapper à son créancier ? La preuve semble bien difficile à rapporter.
(Sources : 29 janvier 2025 Cour de cassation Pourvoi n° 23-20.836 & Louis Thibierge).